Après avoir laissé les voitures dans le charmant village de Prelles et nous être chargés comme des bourriques (car il fait vraiment froid la nuit dans les Alpes), nous avons attaqué la tranquille aventure directement par un chemin grimpant à peine à 40%, une bagatelle pour se mettre en jambes. C’est donc par un soleil de plomb que nous avons commencé à crapahuter dans un décor de plus en plus impressionnant, avec des pentes qui paraissaient l’être tout autant, grimpant de colline en colline, apparemment sans fin mais avec les yeux écarquillés malgré la transpiration et l’effort intense. Les petites pauses de ci de là étant vécues comme une véritable bénédiction, même si « c’est pas forcément bien de s’arrêter quand on marche » nous diront les marcheurs expérimentés. Puis première pause repas assez paradisiaque au bord d’un frais petit ruisseau de montagne descendant en cascade, au milieu des arbres.
Il fallait bien repartir donc nous avons recommencé à grimper, parfois très abruptement, parfois plus sympatiquement, mais finalement toujours avec plaisir, tant les visions qui s’offraient à nous étaient grandisoses. On avait tellement chaud qu’on avait prévenu Tinwë qu’elle avait intérêt à ce que ça fasse vraiment froid la nuit pour justifier les innombrables kilos qu’on portait sur le dos. Mais elle avait habillement prévu le coup, puisqu’après nous être arrêtés pour le dîner, nous nous sommes relayés pour entretenir le feu toute la nuit, et on peut dire que les kilos de couvertures étaient bien justifiés, voire presque insuffisants, mais heureusement comme tout le monde ne dormait pas en même temps, en raison des gardes du feu, on bénéficiait des couvertures de ceux qui veillaient.
Après une nuit bien frisquette sur notre petit campement en pente, nous sommes repartis, démarrant par une pente à faible dénivelé pour un crapahuteur alpin, mais un « mur » comme disent ceux qui vivent en dessous du niveau de la mer. En passant au-dessus du niveau des arbres, nous avons commencé à vraiment découvrir des paysages de plus en plus magiques, entourés de toutes parts par ces montagnes qui vous font vous sentir bien petit.
Notre Belegorn n’avait qu’un rêve : trouver un lac où se baigner et se rafraîchir. Et miracle il y en avait bien proche de notre route ! Tinwë, partie en éclaireuse, revint nous dire que le lac promis étais bien là, ainsi via des pentes herbeuses nous nous y rendons. Et -ô joie- en arrivant au-dessus du petit lac, nous découvrons des vaches et des chevaux, chevaux qui ont particulièrement apprécié les affaires de Tinwë, puisqu’à notre arrivée ils se servaient allègrement dedans pour se nourrir ; c’est ainsi nous avons fait une découverte scientifique importante : les chevaux se nourrissent aussi de cuillers en bois et de chaussures… L’eau étant un peu trop froide et le fond du lac un peu traitre, impossible de s’y baigner, au grand désespoir de qui vous savez, mais cela ne nous a pas empêchés d’y faire notre pause déjeuner, ainsi qu’une bonne sieste.
Et voilà, après ce long intermède, nous sommes repartis par des pentes toujours aussi… euh…pentues, mes genoux râlant à chaque pas. Nous avons donc continué à nous élever progressivement, par herbe et par cailloux, les ampoules commençant à vouloir aussi participer à la fête, et remplissant nos gourdes au gré des petites sources bénies croisées ici ou là. Difficile de décrire vraiment les paysages avec des mots justes, car pour ceux qui comme moi ne connaissaient pas ces hauteurs, du moins sous cet aspect, c’était juste un émerveillement constant, et je n’exagère pas ; la fatigue, la transpiration, tout cela était largement contrebalancé par ce qui s’offrait à nos yeux !
Nous arrivons donc au lieu de notre deuxième camp, pas si éloigné que ça du lac, du moins quand on n’est pas chargé… Mais bien content d’arriver quand même. Décor très différent de la première nuit, puisque nous nous trouvions au milieu de rochers, sur un sol assez caillouteux, dominant une belle vallée, les clochettes suspendues au cou du bétail tintant au loin. Deuxième dîner, à base encore de patates à la braise mais cette fois enrichi par unpeutoutàlabraise, donnant une sorte de raclette improvisée sur des batons, puisqu’aux patates se sont ajoutés diverses pièces de charcuterie et du fromage. Cette deuxième nuit fut aussi très froide, mais mieux gérée pour ma part au niveau des couvertures, donc finalement je m’en suis bien tiré.
Le lever de soleil à cet endroit était magique, Thorongil et Tinwë l’ont ressenti encore plus que nous autres, puisqu’ils sont retournés au lac à ce moment-là pour remplir nos gourdes car il n’y avait pas de source là où nous campions, et ont pu admirer l’aurore de l’autre côté de la montagne tandis qu’Elael l’observait depuis le versant du camp en tentant de maintenir allumé le feu qui semblait bien déterminé à ne pas vouloir le rester.
Et nous voilà ensuite partis pour notre troisième jour de marche, devant nous mener au chalet familial de Tinwë. Après un long crapahutage, un passage de col envahis par les moutons que le chien de Tinwë qui nous accompagnait, du nom de Niorka, s’empressa d’aller renifler, l’arrivée au chalet se fait en descente, descente parfois abrupte, cause de quelques jurons d’Elwë après de multiples glissades et chutes sur les pentes herbeuses un peu traitres. Petite pause sur un rocher plat salvateur et hop dernière étape vers le chalet, avec le sentiment, une fois arrivés, d’avoir trouvé la terre promise. Et quelque part ça l’était vraiment, tant l’endroit est magnifique. Ce petit chalet sans électricité, que nous avons éclairé à la lampe et à la bougie, à la grande table en bois, nous nourrissant d’une succulente omelette aux croutons et aux cèpes que nous avions receuillis sur le chemin, avec en dessert un coulis de groseilles récoltées de nos petites mains, mélangé aux gâteaux d’Elael et aux myrtilles avidemment cuillies sous la tutelle de Tinwë, pour un crumble improvisé de toute beauté, le tout dans une ambiance féérique créée par les flammes de la cheminée et de notre éclairage.
Après un séance d’allongeage nocturne dans l’herbe devant le chalet, à observer les étoiles côte à côte, et à entendre Thorongil s’exclamer quand passaient des étoiles filantes, nous avons passé notre première nuit au chalet, bienheureux. Le lendemain nous nous sommes répartis en deux groupes pour rassembler du bois, des fruits et des champignons, déjeunant d’un petit barbecue très réussi dehors à base d’aubergines et de diverses choses à la braise. Puis il a fallu préparer les champignons pour le soir, les cèpes c’est vraiment gluant, et faire quelques récoltes complémentaires, et le soir ce fut champignons en persillade avec un gratin de courgettes improvisé avec ce que nous avions sous la main. Tellement bon ! Un point culminant de bien-être a dû être atteint à ce moment-là je crois.
Après une deuxième nuit au chalet, arrive donc le dernier réveil dans ce monde à part, avec un petit déjeuner dehors, puis le ramassage des affaires. Eolind, Belegorn et moi sommes redescendus à pied jusqu’à un petit hameau où la maman de Tinwë nous a récupérés, avant d’aller chercher les autres, et les affaires, au chalet. Personnellement, j’avais tellement envie de faire cette petite heure de marche sans rien à transporter que je me suis joint à Eolind et Belegorn. Et voilà comme s’est terminé notre périple, drôle d’impression.
Un grand merci à Tinwë pour avoir organisé cette aventure !
Compte-rendu par Jari